En 2020, l’un des plus importants anniversaires n’est autre que les 110 ans d’Alfa Romeo. A l’heure où les festivités sont de mise, ABSOLUTELY CARS vous propose de partir à la découverte de l’histoire d’Alfa Romeo avec un article entièrement dédié aux Alfa Romeo de propulsion. De la création de la Società Italiana Automobili Darracq (SIAD), à Naples, le 6 avril 1906 à nos jours en passant par le rachat SIAD, par des investisseurs lombards, le 10 juin 1910 ou encore l’intégration d’Alfa dans le groupe de Nicola Romeo (1876-1938) devenant ainsi Alfa Romeo en juin 1918… ABSOLUTELY CARS vous dit tout ce qu’il a à savoir sur la fameuse firme italienne !
La Società Italiana Automobili Darracq, au commencement de tout
Après avoir fabriqué des bicyclettes sous la marque Gladiator, Pierre Alexandre Darracq (1855-1931), entrepreneur français, produisit en 1897, un tricycle électrique dénommé « Triplette Darracq-Gladiator » qui prouva ses qualités en parcourant la distance de 10 kilomètres en 9 minutes et quarante-cinq secondes. La publicité autour de cet événement lui permit d’obtenir de quelques entrepreneurs, une aide financière. Il fonda alors sa propre compagnie sous le nom d’Automobiles Darracq S.A., à Suresnes, près de Paris. En 1898, au salon du cycle de Paris, il présenta une dogcart électrique qui n’eut guère de succès. La même année, il acquit la licence de fabrication du moteur 5ch Léon Bollée. En 1901, il lança une automobile entièrement conçue et construite par son entreprise, un runabout vendu à un prix compétitif grâce à l’utilisation de tôles en acier. Dès 1904, sa société produisit 10% de la production automobile française et, en 1910, elle devint le troisième producteur national, derrière Renault et Peugeot. Pour promouvoir sa marque, Alexandre Darracq engagea ses voitures en compétition : la bicylindre 12hp de 2714cm³ (120x 120) remportant 47 épreuves sur les 52 courues. Des Darracq battirent le record de vitesse terrestre :

- le 13 novembre 1904 à Ostende, Paul Baras atteignit 168,22km/h avec la Darracq 100hp Gordon Bennett équipée d’un 4 cylindres en ligne de 11 259cm (160 x 140) développant 100ch à 1200tr/mn, accouplé à une boîte à vitesses 3 rapports,
- le 30 décembre 1905 à Arles, Victor Hémery atteignit 175,44km/h avec la Darracq V8 Special équipée d’un V8 de 22 519cm³ (160 x 140) développant 200ch à 1200tr/mn, accouplé à une boîte à vitesses 2 rapports.
Le 6 avril 1906, Pierre Alexandre Darracq créa à Naples, la filiale SAID (Società Anonima Italiana Darracq). Fin 1906, il eut la volonté de transférer la production de Naples à Milan pour la rapprocher du siège social de Suresnes. La production fut effective à l’usine de Portello en septembre 1908. La crise de 1909 mit un frein à la production transférée à Portello. La Società Italiana Automobili Darracq (SIAD) est rachetée par des investisseurs lombards le 10 juin 1910. La société Automobiles Darracq S.A. fut, quant à elle, cédée à la filiale anglaise, A.Darracq & Co Ltd, en 1912. La même année, Pierre Alexandre Darracq se retira définitivement du secteur automobile pour se consacrer à l’immobilier et à la gestion de l’hôtel Négresco à Nice.
Les automobiles produites en Italie étaient équipés d’une boîte à vitesses 3 rapports, les trois derniers modèles étant d’équipés d’un arbre de transmission dont allaient bénéficier les Alfa.


Les automobiles Alfa, la première pierre à l’édifice
Alfa, acronyme d’Anonima Lombarda Fabbrica Automobili, fut fondée à Portello, dans un quartier de Milan, le 24 juin 1910. Pour lancer l’activité, Giuseppe Merosi (1872-1956) fut embauché chez Alfa, en 1910. Auparavant, il acquit de l’expérience en œuvrant pour Bianchi, puis pour Fiat. Il conçut, entre autres, l’Alfa 24hp, commercialisée en juin 1910, remarquable par sa fiabilité et sa vitesse maximale de 100km/h et le célèbre moteur de l’Alfa Grand Prix de 1914. Alfa fut mis sous tutelle par l’institut d’état chargé du programme d’armement, en septembre 1915, pour produire du matériel de guerre, des munitions et des moteurs d’avions, sous l’autorité financière de la banque italienne de Sconto et sous la responsabilité technique de la Società in accomandita semplice Ing. Nicola Romeo e Co, fondée en 1911 et spécialisée originellement dans la fabrication de machines pour l’extraction des minerais. A la fin de la Première Guerre mondiale, en juin 1918, Alfa intègre le groupe de Nicola Romeo (1876-1938), devenant ainsi Alfa Romeo. Quant à Giuseppe Merosi, il quitta Alfa qu’en avril 1926, pour travailler chez Isotta-Fraschini.




Les Alfa Romeo d’avant guerre : les premières Alfa Romeo de propulsion
Les Alfa Romeo de tourisme conçues pendant l’entre-deux-guerres reprenaient de nombreux éléments mécaniques des voitures de compétition. Elles étaient équipées d’une boîte à vitesses 4 rapports. Les freins sur les 4 roues furent adoptés sur les modèles Alfa Romeo RL et Alfa Romeo RM, les freins hydrauliques sur l’Alfa Romeo 6C 1500, les 4 roues indépendantes sur les Alfa Romeo 6C 2300B, Alfa Romeo 6C 2500 et Alfa Romeo 8C 2900B.


Nicola Romeo dirigea la société jusqu’en 1928, Pasquale Gallo (1887–1982) lui succédant. Quant à Enzo Ferrari (1898-1988), il débuta sa carrière chez Alfa Romeo, en 1920, comme pilote de course. En 1924, il obtint sa plus belle victoire en remportant la coupe Acerbo en battant les puissantes Mercedes. Ce jour là, il reçut le titre de « Cavaliere ». Il s’occupait également de la relation avec les fournisseurs. Parallèlement, fin 1929 avec l’approbation d’Alfa Romeo, il fonda, à Modène, la Società anonima Scuderia Ferrari dont l’activité fut de seconder les pilotes de haut niveau et les propriétaires privés, acquéreurs d’Alfa Romeo. En 1932, apparut le cheval cabré sur les carrosseries. Il quitta Alfa Romeo en 1939 et créa Ferrari en 1947. Sous son impulsion, les Alfa Romeo devinrent de véritables machines à gagner. En France, la marque acquit ses lettres de noblesse en gagnant consécutivement les 24 Heures du Mans de 1931 à 1934 avec le modèle Alfa Romeo 8C 2300. Les hommes talentueux recrutés par Enzo Ferrari furent :
- Vittorio Jano (1891-1965) débuta sa carrière chez Fiat, en 1911. En 1923, il fut débauché par Enzo Ferrari. Il contribua fortement à créer le mythe du constructeur milanais en concevant une longue série de moteurs exceptionnels (8 cyl. en ligne muni d’un double arbre à cames en tête et d’un compresseur monté sur l’Alfa Romeo P2, 6 cyl. en ligne muni d’un double arbre à cames en tête monté sur l’Alfa Romeo 6C 1500, V12 muni d’un compresseur développant 370ch en 1936, V12 muni de deux compresseurs délivrant 430ch en 1937). Il fut ensuite recruté par Lancia où il participa à la conception, entre autres, de la fameuse Lancia Aurelia. Après le retrait de la Scuderia Lancia des compétitions en 1955, il rejoignit Ferrari où il termina sa carrière. Vittorio Jano perdit son fils, en 1965, devint gravement malade et se suicida. Enzo Ferrari rendit hommage à celui-ci en disant : « Il a vécu par la force et par la force, il nous a quitté. Je n’ai pas été surpris de la cohérence avec laquelle il a conclu son existence, et j’ai aussi admiré le geste, que je considère relevant d’un suprême courage ».
- Gioacchino Colombo (1903-1988) travailla comme apprenti avec Vittorio Jano chez Alfa Romeo. En 1937, Il conçut le moteur 158 pour l’Alfa Romeo Alfetta. Après la Seconde Guerre mondiale, il œuvra chez Ferrari et introduit le petit V12 de 1,5 litre pour les voitures de route et de course d’endurance jusqu’à obtenir un 3,3 litres. En 1950, il retourna chez Alfa Romeo pour superviser les efforts de course de l’entreprise. En 1953, chez Maserati, il créa la Maserati 250F Grand Prix. En 1955, il tenta de relancer Bugatti en œuvrant sur la Bugatti 251, puis travailla chez MV-Agusta de 1957 à 1970.
- Orazio Satta Puliga (1910-1974) débuta sa carrière chez Alfa Romeo en 1938 et travailla sur les Alfa Romeo 158, Alfa Romeo 159, Alfa Romeo 1900, Alfa Romeo Giulietta, Alfa Romeo Giulia, Alfa Romeo Montreal et Alfa Romeo Alfetta. Il fut membre de la direction entre 1951 et 1973.
En 1939, plein d’admiration, Henry Ford (1863-1947) dit à Ugo Gobbato (1888-1945), directeur d’Alfa Romeo entre 1933 et 1945 : « Quand je vois passer une Alfa Romeo, j’enlève mon chapeau ». Edsel Ford (1893-1943), son fils, lui proposa d’en acheter une. Henry Ford lui rétorqua que ce n’était pas dans ses moyens. A cette époque, chez Ford, les personnes les mieux rémunérées percevaient 20 fois le salaire le plus bas donné par l’entreprise italienne, salaire par ailleurs deux fois plus élevé que celui pratiqué dans les autres manufactures.










La nationalisation d’Alfa Romeo en 1933
En 1933, Alfa Romeo était au bord de la faillite. Son engagement en compétition lui coûtait très cher et les modèles de tourisme élitistes hors de prix ne s’adressaient qu’à une petite clientèle. La firme fut nationalisée par l’Institut pour la Reconstruction Industrielle, fondé en 1933 par le Premier Ministre Benito Mussolini. A noter qu’entre 1910 et 1953, la production annuelle moyenne d’Alfa Romeo représentait qu’un volume d’environ 530 voitures. La raison la plus souvent avancée pour ce sauvetage fut que l’engagement en compétition d’Alfa Romeo et ses résultats permirent à Benito Mussolini de briller sur la scène internationale…


Mais plus pragmatiquement, que représentait l’usine de Portello ? En 1910, un moteur Alfa fut utilisé sur le biplan de Santoni-Franchini. Cette activité reprit en 1924 et en 1938, elle fut transférée dans la nouvelle usine de Pomigliano d’Arco située à proximité de Naples. Cette branche devint Alfa Romeo Avio. 10% de parts sociales furent cédées à Aeritalia en 1982, cette participation augmenta jusqu’à 60% en 1984, puis à 100% en 1986. En 1996, la maison mère Finmeccanica vendit sa division Aviation à Fiat Avio. De 1931 à 1964, Alfa Romeo construisit des camions, d’abord à Portello, puis après la Seconde Guerre mondiale à Pomigliano d’Arco, chez Alfa Romeo Avio. Le premier, le Alfa Romeo type 50 (1931-1934), avait un 6 cylindres diesel de 10,6 litres offrant 80ch à 1200tr/mn ; les seconds, les Alfa Romeo types 80/85 (1932-1939) avaient un 6 cylindres diesel de 11,56 litres offrant 110ch à 1200tr/mn. De 1934 à 1965, furent également réalisés des autobus ; de 1936 à 1964, des trolleybus ; de 1954 à 1987, des véhicules utilitaires légers.
Le potentiel d’Alfa Romeo était donc immense pour une nation qui allait s’engager dans la Seconde Guerre Italo-éthiopienne (1935-1936). L’usine de Portello fut active de 1908 à 1965, celle d’Arese, près de Milan, de 1963 à 2000, la seconde usine de Pomigliano d’Arco dite Alfasud de Pomigliano depuis 1972, l’usine Fiat Mirafiori, à Turin, pour l’Alfa Romeo MiTo, de 2008 à 2018, l’usine Fiat Piedimonte San Germano à Cassino pour les Alfa Romeo Giulietta, Alfa Romeo Giulia et Alfa Romeo Stelvio depuis 2010.
Les Alfa Romeo de propulsion exceptionnelles depuis la Seconde Guerre mondiale
La première édition du Championnat du monde de Formule 1 eut lieu en 1950. Trois Alfa Romeo Alfetta châssis 158 furent engagées, une pour Giuseppe Farina (1906-1966), une pour Luigi Fagioli (1898-1952) et une pour Juan Manuel Fangio (1911-1995). Le classement fut sans appel : Giuseppe Farina, champion, Juan Manuel Fangio, second, Luigi Fagioli, troisième ! En 1951, Juan Manuel Fangio fut champion du monde sur Alfa Romeo 159.
La première nouvelle voiture introduite après la Seconde Guerre mondiale fut l’Alfa Romeo 1900, en 1950. Son 4 cylindres tout en alliage était équipé d’un double arbre à cames en tête. Sa boîte à vitesses avait 4 rapports parfaitement synchronisés. Seules les roues avant étaient indépendantes. Sa carrosserie monocoque était de type ponton. Ses pneus étaient des Michelin X à carcasse radiale nouvellement lancés. Son prix était élevé. En comparaison, les volumes de vente des voitures haut de gamme entre Renault et Alfa Romeo, toutes les deux nationalisées, se révélaient totalement différents : la Renault Frégate fut fabriquée en 180 463 exemplaires tandis que l’Alfa Romeo 1900 fut produite en 19 157 exemplaires dont 1 070 berline Ti (Turismo internazionale) et 2 194 carrossées par des artisans.



L’Alfa Romeo 1900 fut déclinée également. L’Ika Kaiser Bergantin fut fabriquée, en Argentine, en 8 351 exemplaires ,de 1960 à 1962, seulement sa carrosserie était commune avec celle de l’Alfa Romeo 1900. Un véhicule tout terrain fut également extrapolé de l’Alfa Romeo 1900 avec une version militaire, l’Alfa Romeo AR51, disponible de 1951 à 1955 et construit en 2050 exemplaires et une version civile, l’Alfa Romeo AR52, disponible de 1952 à 1954 et construit en 155 exemplaires. Il était équipé de 4 roues motrices, d’une boîte de transfert, de suspensions avant indépendantes.
En 1953, l’Alfa Romeo 1900 adopta un 2 litres. En 1958, elle se mua en une jolie limousine appelée Alfa Romeo 2000. En 1962, elle adopta un 6 cylindres en ligne et les freins à disques à l’avant et se dénomma Alfa Romeo 2600. Entre 1958 et 1968, elles furent réalisées en 18 453 exemplaires.


D’autres magnifiques Alfa Romeo lui succédèrent :
- De novembre 1967 à mars 1969, fut fabriquée en 18 exemplaires l’étonnante Alfa Romeo 33 Stradale, dessinée par Franco Scaglione (1916-1993), équipée d’un V8 central longitudinal arrière, de 4 freins à disque ventilés, de 4 roues indépendantes. Le 0 à 100km/h était abattu en 5,5s.
- De 1970 à 1977, fut réalisée en 3 925 exemplaires la magnifique Alfa Romeo Montreal 3 portes dessinée par Marcello Gandini (1938-….), équipée d’un V8 avant, de roues avant indépendantes. Le 0 à 100km/h était abattu en 7,1s.
- De 1979 à 1986, fut fabriquée en 12 070 exemplaires la limousine Alfa Romeo Alfa 6, équipée de roues avant indépendantes.
- De 2007 à 2010, furent réalisés dans l’usine Maserati de Modène les Alfa Romeo 8C Competizione 3 portes et Alfa Romeo 8C Spider en, respectivement, 500 et 329 exemplaires. Dessinés par Wolfgang Egger (1963-….), ils étaient équipés de 4 roues indépendantes et de la solution technique transaxle (V8 à l’avant et boîte à vitesses à l’arrière). Le coupé abattait le 0 à 100km/h en 4,2s, le spider en 4,5s.











Article écrit par : ABSOLUTELY CARS & CARDO
Crédit Photos : ABSOLUTELY CARS & Photos d’Archives
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