Bond, créateur d’atypiques micro-cars

Bond… Elles s’appellent Bond… mais n’ont aucun lien avec leur homonyme, un célèbre agent secret britannique. Leur seul point en commun sont leurs origines : Bond est, en effet, une marque automobile d’outre-manche. L’aventure commence avec l’ingénieur Lawrence Bond qui imagina l’une des plus célèbres micro-cars anglaises ! S’associant avec Sharp’s Commercials Ltd, une société experte dans le reconditionnement des voitures utilisées par l’armée, il connaîtra un vif succès qui inscrira son nom dans la légende. Rachetant ses droits, Shap’s Commercials Ltd se lancera alors comme constructeur automobile, jusqu’à devenir en 1964 Bond Cars Limited, produisant quelques unes des plus étranges voitures anglaises ! ABSOLUTELY CARS revient sur l’histoire de cette marque automobile, auteur des premières microcars de l’Union Jack !

La Bond Minicar, la “voiture la plus économique du monde”

Pour comprendre l’histoire de la marque automobile Bond, il faut tout d’abord s’intéresser à Lawrence “Lawrie” Bond (1907-1974). Né à Preston, dans le Lancashire, Lawrence Bond travailla en tant qu’ingénieur dans plusieurs sociétés dont l’entreprise d’aéronautique Blackburn Aircraft Company durant la Seconde Guerre mondiale. Après la guerre, il créa une petite entreprise d’ingénierie à Blackpool et fabriqua des composants d’avions et de véhicules pour le gouvernement. En parallèle, il connut un succès modeste en tant que pilote de course amateur et concepteur de voitures de course, puisant son inspiration dans l’industrie aéronautique.

En 1948, Lawrence Bond imagina une voiture à trois roues qui répondait au besoin de se déplacer économiquement et efficacement sur des petits trajets dans un rayon de 60km environ. Capable de monter une pente à 25% avec conducteur et passager, ce concept-car était équipé d’un bloc-moteur Villiers à deux temps de 125 cm3, accouplé à une boîte de vitesse 3 rapports. Il pouvait aller jusqu’à 50 km/h pour un poids de 129kg. Le projet connut un vif succès auprès de la presse, dévoilant ainsi un intérêt commercial.

Engagée par le Ministère de l’Approvisionnement, Sharp’s Commercials Ltd voit, de son côté, son contrat avec le gouvernement arriver à terme. Lawrence Bond approcha alors le Lieutenant-Colonel Charles Reginald ‘Reg’ Gray, Directeur de la Sharp’s Commercials Ltd, pour louer son usine. Ce dernier refusa, proposant à la place de construire eux-mêmes la voiture. La Bond Microcar venait de voir le jour !

Tout comme le prototype, la Bond Microcar était dotée d’un châssis et d’une carrosserie en aluminium, à mi-chemin du monocoque et du cadre rigide. Equipée de trois roues, deux à l’arrière et une seule à l’avant, la voiture a été soigneusement étudiée pour éviter de se retourner à chaque virage. En effet, le conducteur et ses deux passagers sont assis sur une banquette au-dessus de l’essieu arrière, face à un habitacle épuré et austère. Sous la banquette, se trouve un petit coffre. Côté mécanique, la voiture de série garde le même moteur que le prototype, soit un mono-cylindre refroidi par air de 6ch, toujours accouplé à une boîte manuelle 3 rapports. La transmission se fait uniquement sur la roue avant et les freins à tambours ne sont présents que sur les roues arrières. Particularité : la Bond Microcar n’a pas de marche arrière à cause de son moteur de moto ! Mais que nenni, ce qui fait la force de cette micro-car, c’est sa consommation ! Pour prouver qu’elle était la “voiture la plus économique du monde”, elle rallia Preston à Londres à une vitesse moyenne de 36,7 km/h, consommant que 2,9L/100 !

En décembre 1949, la Bond Microcar Deluxe voit le jour, équipée d’une roue de secours, d’un seul rétroviseur et d’un essuie-glace électrique. Avec cette version, elle se voit également équipée d’un dispositif d’inversion mécanique (en option) afin de pouvoir enfin la faire reculer.

Comme attendu, la belle connut un succès instantané et s’écoulera en 28 mois de carrière à près de 1 973 unités ! Il faut dire que, sa conformation aidant, elle était globalement moins taxée que le reste du parc automobile britannique grâce à ses trois roues. De plus, un simple permis moto était suffisant pour la conduire ! Un succès que ne verra pas Lawrence Bond puisqu’il quitte le projet en cours de route, vendant ses droits de conception et de fabrication à Sharp’s Commercials Ltd.

En avril 1951, la Bond Microcar évolue, passant de la Bond Mark A à la Bond Mark B. Cette deuxième série voit sa technique évoluer : l’essieu arrière reçoit une nouvelle suspension, la capacité du coffre est augmentée, la vitre en plexiglas est remplacée par un pare-brise Triplex, la mécanique est légèrement boostée en termes de cylindrée (197cm3) et de puissance (10ch). Toutefois, ces évolutions techniques ne sont pas accompagnées par un restylage. De ce fait, les deux générations se ressemblent énormément. La Bond Mark B ne sera commercialisée qu’un an et demi, à 1 414 unités dont 240 minitrucks et 84 minivans.

Alors que Sharp’s Commercials Ltd vient à peine de lancer la Bond Mark B, le constructeur britannique pense déjà à l’avenir avec la Bond Mark C. Outre un châssis monocoque, cette nouvelle génération se voit offrir une ligne générale inédite, à la fois esthétique et fonctionnelle. Elle arbore alors des fausses ailes avant, une porte côté passager et une cantonnière sous sa calandre ovale. Bref, c’est une Bond Microcar complètement relookée qui est présentée au Earl’s Court Cycle and Motor Cycle Show en 1951. Ce nouveau style est bien accueilli et déjà les premiers exemplaires sont commandés ! Cette 3ème génération voit aussi sa gamme s’élargir avec le break, le van et le cabriolet. En janvier 1953, certains exemplaires se voient équipés d’ailes arrière en fibre de verre, avant que cela devienne standard en décembre 1954. En juin 1953, son moteur évolue également. Elle connaîtra d’autres changements mineurs tout au long de sa longue carrière qui dura 3 ans et demi. Elle sera écoulée à 6 593 unités écoulées avant d’être remplacée par la Bond Mark D.

En mai 1956, arrive la Bond Mark D. Rien de révolutionnaire au niveau de l’esthétique, puisqu’elle est très similaire à sa devancière. C’est du côté mécanique que la voiture évolue : le moteur est amélioré et monte à 9ch, lui permettant une vitesse de pointe de 82 km/h. Mais surtout, la boîte de vitesse se dote d’une marche arrière ! L’arrivée de la Bond Mark E en décembre 1957 écoute sa carrière, puis que cette 4ème génération s’arrête au bout de deux ans, en 1958, après 3 760 exemplaires.

L’arrivée de la Bond Mark E dépoussière le concept de la Bond Microcar ! En effet, cette cinquième génération se veut radicalement différentes dans la “ligne de voitures modernes”. Dotée d’un châssis semi-monocoque, elle voit son empattement s’allonger de 30cm.  Elle possède la particularité d’être constituée de deux cadres en acier : le premier supporte le planché, la suspension arrière et les portes ; le second, qualifié de “semi-flottant” supporte le bloc-moteur et la direction. Hélas, ces changements structurels et dimensionnels affecte la stabilité de la voiture, devenant plus facilement renversable. Côté équipement, la Bond Mk E se voit dotée de phares plus grands, de clignotants, de fenêtres coulissantes, de deux essuie-glaces, d’un réservoir plus important, d’un dossier divisé en deux pouvant s’ajuster pour la partie conducteur… La forme du tableau de bord est modifiée. La mécanique évolue : elle se voit équipée d’un bloc-moteur Villiers 9E/4S accouplé à une boîte 4 rapports, lui permettant d’aller jusqu’à 80 km/h. Maître en communication, Sharp’s Commercials Ltd fait en sorte que ce soit trois Bond Mark E qui inaugurent la première autoroute du Royaume-Uni, le 5 décembre 1958, sous le regard de la presse !

Une manière parfaite pour préparer la suite, car la Bond Mark E laissa place à la Bond Mark F, en novembre 1958. Si le design ne change guère, décliné en Tourer, Saloon Coupé et 4-Seater Family Saloon, cette nouvelle génération voit sa motorisation évoluée avec un bloc-moteur Villiers 31A de 12ch pour une pointe de vitesse maximum de 89 km/h. Le fourgon est introduit en mars 1960. Le modèle sera produit à 8 595 exemplaires jusqu’en 1961, avant d’être remplacé par la Bond Mark G.

L’ultime série, la Bond Mark G, sort en août 1961 avec un dernier lifting avec un nouveau toit en fibre de verre, de nouvelles portes, un nouveau pare-brise plus incliné et de plus grandes roues. L’avancée de la cabine permet d’y installer une banquette arrière pouvant accueillir deux adultes à l’arrière tandis que les sièges avant réglables en position, peut être rabattu beaucoup plus vers l’avant que sur les modèles précédents pour permettre un accès plus facile à l’arrière. A noter que les portes quelques petites demandent quelques dons de contorsionniste pour y avoir accès. Sous le capot, nous retrouvons un bloc-moteur Villiers Mk 35A de 12ch, spécialement développé pour ce modèle. Le freinage passe par un système semi-hydraulique agissant sur les trois roues. En 1962, la gamme inclue le Ranger et l’Estate. Hélas, le changement de réglementation et de taxes réduit la différence de tarifs avec les autres micros-cars à quatre roues. Le constructeur Bond réagit et propose, en mars 1963, la possibilité de l’équiper d’un moteur de 15ch, lui permettant une pointe de vitesse à 97 km/h et une consommation de 4,9L/100 km. Pour endiguer la baisse des ventes, il sorte, en avril 1964, la berline avec son coffre ouvrant, puis en octobre 1964, une version économique 2 places dénommée Bond Mark G Tourer. La Bond Microcar Mark G sera produite jusqu’en novembre 1966, à 4 298 exemplaires. Au total, la marque Bond a vendu à plus de 24 880 exemplaires en 17 ans de carrière.

Les autres automobiles produites par Bond Cars Ltd

La Bond Equipe, l’unique modèle à 4 roues

1963 est l’année des grands changements. Sharps Commercials Ltd devient Bond Cars Ltd. Sentant le marché des micro-cars périclité, le constructeur britannique change de fusils d’épaule et souhaite proposer un coupé sportif. Pour cela, il fait appel à Triumph chez qui il se fournira désormais en châssis pour produire sa nouvelle voiture. En effet, la Bond Equipe GT 2+2 est basée sur le châssis Triumph Herald associé à une carrosserie en fibre de verre fastback dont le design est signé Andrew Bond. D’autres pièces “Triumph”, issues des Triumph Herald, Spitfire et Vitesse, dont le pare-brise, les portières, la planche de bord, l’instrumentation ou encore les sièges, seront également utilisés.

Côté mécanique, nous retrouvons le 4 cylindres de 1147cm3 à double carburateurs de la Triumph Spitfire. Développant 63ch, il est accouplé à une boîte manuelle 4 rapports (+ overdrive). Le système de freinage est assuré par quatre freins à disques, auquel on ajoute une tenue de route facilitée par quatre roues indépendantes. Les performances lui permettent d’atteindre 145km/h en pointe pour un poids de 720kg.

Hélas, à cause de sa ligne, son côté 2+2 s’envoie réduit. De plus, l’accès au coffre se fait par l’intérieur en baissant la banquette arrière. Produite d’avril 1963 à octobre 1964, cette première génération ne sera produit qu’à seulement 451 exemplaires, la promotion et la distribution passant par les concessions Triumph.

bond gt 01

En septembre 1964, Bond Cars Ltd présente la nouvelle version de la Bond Equipe avec la Bond Equipe GT 4S. Complètement restylée pour palier aux défauts de la précédente, sa face avant accueille désormais deux phares supplémentaires issus de la Triumph 2000. Sa garde au toit est plus élevée et son coffre s’ouvre de l’extérieur Côté moteur, la même motorisation est conservée, quoi qu’augmentée de quelques chevaux pour atteindre les 67ch. Les ventes s’améliorent et la Bond Equipe GT 4S se voit commercialiser, jusqu’en janvier 1967, à 1934 exemplaires.

Lancée en février 1967, la Bond Equipe adopte, en avril de la même année, la motorisation de la Triumph Spitfire MKIII, soit un 4 cylindres de 1296cm3 développant 75ch. Dénommée Bond Equipe GT 4S 1300, elle sera produite à 571 exemplaires, jusqu’en août 1970.

En parallèle de la Bond Equipe GT 4S 1300, Bond Cars LDT sort la Bond Equipe 2 litres Mark I, dès août 1967. Si elles portent le même nom, ce nouveau modèle n’a plus rien à voir avec le petit coupé sportif du début. Tout d’abord, il est basé sur le châssis de la Triumph Vitesse dont il utilise le moteur, soit un 6 cylindres de 1998 cm3 développant 95ch, lui permettant une vitesse maximum de 161 km/h. Ensuite, le design signé Trevor Fiore offre une ligne plus lisse et une carrosserie plus large, changeant complètement l’esprit et le style de la voiture. En septembre 1968, la gamme est complétée par le cabriolet tandis que la Bond Equipe 2 Litres Mark II arrive sur le marché. Elle voit ses suspensions être améliorées tandis que sa puissance monte à 105ch. Vendues respectivement à 591 exemplaires pour la Bond Equipe 2L MKI et à 841 exemplaires pour la Bond Equipe 2L MKII, leur production est arrêtée en octobre 1970, suite au rachat de Bond Cars Ldt par Reliant.

La Bond 875, la suite de la Bond Microcar

Bond Cars Ldt se devait d’offrir une descendance à sa Bond Microcar, mais de n’importe quelle manière. Ainsi, a été développé la Bond 875. Annoncée pour août 1965, sa production ne sera lancée qu’en 1966. Le but est de continuer à investir le marché des micro-cars tout en adoptant le statut de véritable voitures. Sa structure se compose ainsi d’un châssis tubulaire léger sur lequel repose une carrosserie en fibre de verre et des portières en aluminium dont le design est signé Andrew Bond. Le tout est supporté par trois roues. Mais la vraie révolution se trouve sous le capot : un 4 cylindres Hillman de 875cm3, développant 34ch et accouplé à une boîte manuelle 3 rapports. La différente se fait à travers son faible taux de compression et sa position en porte-à-faux arrière, véritable unique pour les trois roues britanniques de l’époque ! Avec son poids de 400kg, le tricycle Bond abat le 0-100 en 22.5 secondes et atteint les 122km/h en vitesse de pointe. Testée par le pilote de course John Surtees, la voiture frôle même les 161 km/h, si bien que la presse se demande si une voiture de course n’est pas en préparation ! En avril 1968, elle connaît un restylage (phares rectangulaires, nouvelle calandre, ouverture de capot plus grande, sièges révisés…) et prend le nom de Bond 875 MkII. Sa production s’arrêtera en 1970 pour les mêmes raisons que la Bond Equipe, après 3 431 unités.

La Bond Bug, la “der des ders”

En février 1969, Reliant achète Bond Cars Ldt. Le constructeur britannique ressort un ancien projet des placards qui aurait dû donner la Reliant Rogue. Craignant que cela nuise à l’image de marque de Reliant, la voiture n’avait jamais été mise en production. Mais l’opportunité faisant le larron, Reliant décide finalement de lancer son cyclecar sportif. Tom Karen se voit confier alors les anciens croquis d’Ogle Design pour en sortir une voiture nouvelle résolument très “seventies” ! La Bond Bug est née !

Basée sur le tout nouveau châssis Reliant, la Bond Bug reprend certaines pièces de la Reliant Regal dont l’arrière est raccourci afin de terminer sur l’essieu arrière. Elle est déclinée en trois gammes, de la plus bas de gamme à la plus haut de gamme : la Bond Bug 700, la Bond Bug 700E et la Bond Bug 700ES. Seventies oblige, elles sont toutes proposées en orange mandarine avec l’intérieur noir, bien que six Bond Bug blanches furent produites pour en faire des voitures publicitaires pour une marque de cigarettes. Pour accéder à l’intérieur, il faut faire basculer une partie de l’habitacle vers l’avant. Les équipements sont très satisfaisant au regard de ses sièges avant-gardistes coulés dans la masse et son cockpit réglable (ou fixe). A noter que la Bond Bug 700ES était équipée, en plus, de sièges plus ergonomiques, d’un rembourrage sur le capot moteur, de bavettes doubles, d’un cendrier, d’un pare-chocs avant en caoutchouc et une roue de secours.

Côté mécanique, nous retrouvons le 4 cylindres de 700cm3 de la Reliant Regal, développant 29ch et accouplé à une boîte manuelle 4 rapports et une transmission sur les roues arrières. La Bond Bug 700ES est légèrement plus puissance, avec ses 31ch, grâce à une culasse redessinée pour un meilleur taux de compression. Le tout ne pèse que 407kg et offre des performances frôlant les 122km/h ! Avec de tels chiffres, la Bond Bug n’a pas à rougir face aux autres petites berlines de type Mini et autres Hillman.

Hélas, le résultat n’est pas au rendez-vous avec des finitions trop approximatives, un prix légèrement trop élevé et du retard dans la production. La Bond Bug ne rencontre pas son public et est arrêtée en 1974 après 2270 exemplaires. En 1975, Reliant tente de lancer la Bond Bug 750, basée sur la Reliant Robin 750, mais abandonne l’idée après 200 exemplaires. Des prototypes à quatre roues seront même imaginés, mais ne verront jamais le jour. Ainsi disparut Bond Cars Ldt.

Article écrit par : ABSOLUTELY CARS
Crédit Photos : ABSOLUTELY CARS & Photos d’archives

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