Lorsque la Simca Aronde fut présentée le 31 mai 1951, la presse et le public furent unanimes : elle était magnifique ! Première Simca à carrosserie monocoque au design résolument moderne, elle marque d’une pierre blanche l’histoire de Simca : permettre au constructeur français de ne plus fabriquer de Simca dérivées des Fiat et pouvoir les vendre à l’exportation. Une magnifique carte à jouer, car la fabuleuse Simca 9 Aronde était alors sans concurrence. Les voitures les plus huppées largement diffusées dans l’hexagone étaient la Ford Vedette, la Citroën Traction Avant et la Peugeot 203. Les voitures populaires étaient représentées par la Citroën 2CV, la Renault 4CV, la Panhard Dyna X, la Simca Six étant retirée du marché en 1950. Entre ces deux catégories, un vide en matière de propositions existait. Par son style ponton, elle démodait sa devancière, la Simca Huit, mais également toutes les voitures françaises représentatives en termes de volume de vente ! A l’occasion de ses 70 ans, ABSOLUTELY CARS vous propose de (re)découvrir ce modèle mythique qui n’a pas pris une seule ride !

La Simca Aronde, la première vraie Simca

Cette dernière carte abattue par Henri Théodore Pigozzi fut une carte maîtresse. Elle partageait les solutions techniques retenues pour la Fiat 1400 présentée au Salon de Genève en mars 1950 : roues avant indépendantes, caisse autoporteuse, emploi de l’outillage Budd. Cependant, son empattement était différent : 2,65m pour la Fiat contre 2,44m pour la Simca. Sa longueur était également différente (4,31m contre 4,01m) tout comme sa largeur (1,66m contre 1,56m) et sa hauteur (1,5m contre 1,47m). Bref, la Simca Aronde était mignonne et Henri Théodore Pigozzi fit passer son message auprès des journalistes : « l’Aronde est la première vraie Simca et non plus une Simca-Fiat ».
De plus, René Dumas avait américanisé sa ligne, la Fiat 1400 ayant des flancs jugés trop impersonnels. La Simca Aronde s’est vue alors offrir une arrête horizontale sur le passage des roues avants, un bas de caisse souligné par un déport remontant sur le passage de roue arrière, une calandre en forme de podium…
Le moteur et la boîte à vitesses 4 rapports provenaient de la Simca Huit. Son 4 cylindres de 1221cm³ muni de soupapes en tête ne délivrait plus 37ch à 4000tr/mn, mais 45ch à 4500tr/mn. Ce choix était dicté par la volonté que cette nouvelle voiture demeurât une 7cv fiscaux et non une 8cv en exploitant le moteur de la Fiat 1400.

La Simca Aronde entra en symbiose avec ses futurs acquéreurs. Elle répondait aux attentes de la génération « zazou » : liberté (SIMCA pouvait exporter), indépendance (rupture de la filiation avec la production italienne), contre-culture (carrosserie ponton), port de vêtements excentriques anglais ou américains (style américanisé), insouciance (plein emploi et matières premières plus abondantes). En effet, le groupement GFA qui incluait Simca, fut dissout en 1951, les approvisionnements étant devenus plus faciles. Henri Théodore Pigozzi allait faire évoluer son Simca Aronde chaque année, à l’instar des constructeurs américains, par de menus ou d’importants changements. La Simca Aronde rencontra son public et elle fut fabriquée à 1 274 819 exemplaires entre mai 1951 et mars 1964. Elle fut la voiture la plus vendue en France en 1956 !
Les différentes variantes de carrosseries de la Simca Aronde et ses évolutions

Au Salon de Paris d’octobre 1951, la Simca Aronde berline était accompagnée d’une Simca Aronde break et d’une Simca Aronde fourgonnette tôlée, dénommés respectivement Simca Aronde Commerciale et Simca Aronde Fourgonnette. Leurs fabrications ne débutèrent qu’en octobre 1952. En décembre 1952, les utilitaires furent rebaptisés : Simca Aronde Châtelaine pour le break et Simca Aronde Messagère pour la fourgonnette. Ils furent complétés par une variante Commerciale (fourgonnette semi-tôlée) et une camionnette.
Au Salon de Paris d’octobre 1952, furent présentés un cabriolet dénommé Simca Aronde Plein Ciel et un coach baptisé Simca Aronde Grand Large, équipé d’un pavillon de type hard top, les glaces latérales s’escamotant sans laisser trace d’un moindre montant, la lunette arrière étant constituée par trois vitres. Ils devinrent disponibles à la vente au cours de l’année 1953. La même année, le cabriolet fut retiré du marché et la calandre prit des formes courbes en intégrant le sigle en son milieu. La berline et le coach adoptèrent des roues de 14 pouces au lieu des 15 pouces et furent qualifiés de surbaissés.



Au Salon de Paris d’octobre 1955, la Simca Aronde adopta le moteur Flash 3 paliers de 1290cm³ et les utilitaires, le moteur Flash Service. La puissance fiscale demeurait 7cv. Les moustaches de la calandre se tendirent et le sigle central disparut. Sur la berline et le coach, les ailes arrière et le couvercle du coffre s’allongèrent, la longueur étant portée à 4,12m. Le starter automatique était adopté. La lunette arrière du coach devint d’un seul tenant. La boîte automatique 3 rapports baptisée Simcamatic devint disponible en option. La camionnette prit comme dénomination Intendante.

Au Salon de Paris d’octobre 1956, la gamme fut complétée par la berline Simca Aronde Elysée Matignon (remplacée au millésime suivant par la Simca Aronde Montlhéry) et par le coach Simca Aronde Rue de la Paix… Au programme : le moteur Flash Spécial développant 57ch à 5200tr/mn au lieu de 48ch à 4800tr/mn.
Pour prouver l’endurance du moteur Flash, une Simca Aronde, la 538 080ème produite depuis 1951, fabriquée le 20 mars 1957, se retrouva sur l’autodrome de Montlhéry le 9 avril à 6h. La voiture tourna pendant 38 jours et 37 nuits jusqu’au 16 mai à 14h. 100 000 km avaient été parcourus à une moyenne de 113km/h !


Au Salon de Paris d’octobre 1958, apparut la Simca Aronde P60, une version restylisée d’une longueur de 4,19m. En 1959, la production des Simca Aronde et Aronde P60 atteignit 194 553 exemplaires. Au Salon de Paris d’octobre 1960, apparut le moteur Rush 7cv 5 paliers. Les combinaisons entre les moteurs et les carrosseries restylisées ou non devinrent étendues. Pourtant, dans les années 1960, les propriétaires des Simca Aronde non passionnés par les automobiles s’y retrouvaient.



Les utilitaires Simca Aronde embrassèrent l’esthétique de la Simca Aronde P60 sur la moitié avant lors du Salon de Paris d’octobre 1959. Un an plus tard, le moteur Rush Service fut adopté. La pépite fut la Simca Aronde Ranch, une Châtelaine équipée du moteur de la berline Montlhéry, soit un break sportif selon les critères de l’époque. Le 4 cylindres OHV Flash Spécial de 60ch fut utilisé de 1959 à 1960, puis le Rush Super 5 paliers de 62ch entre 1960 et 1963.



L’audace de Henri Théodore Pigozzi
Henri Théodore Pigozzi, surnommé “Monsieur Simca“, fut audacieux dans ses choix : carrosserie ponton, monoculture, emprunt pour acquérir l’outillage Budd… La Simca Aronde se vendit très bien, ce qui généra une manne financière. En 1951, Henri Théodore Pigozzi acheta le constructeur de tracteurs agricoles MAP (Manufacture d’Armes de Paris) situé au 271, bd Ornano à Saint-Denis, qui continua la fabrication des tracteurs sous la marque SOMECA (SOciété de MECAnique de la Seine). En 1952, Henri Théodore Pigozzi acheta le constructeur de camions UNIC qui fabriqua des automobiles à Puteaux de 1905 à 1939.
En 1954, SIMCA acheta l’usine surdimensionnée de Poissy et la possibilité d’exploiter la nouvelle Ford Vedette sous son nom. Au printemps 1957, Simca monta, dans une carrosserie de Simca Vedette, un 4 cylindres OHV Flash de 48ch. Cela donna la Simca Ariane qui reçut le moteur Rush Super 5 paliers de 62ch entre 1960 et 1963. En 1958, Simca acheta Talbot-Lago-LAGO et son usine de Suresnes dont une partie était louée au constructeur VELAM qui produisit entre 1955 et 1958, la Velam Isetta. Simca fut le 2ème constructeur français d’automobiles de 1955 à 1959.
En 1958, le groupe Chrysler acheta les 15% de parts sociales de Simca détenues par Ford depuis l’achat de l’usine de Poissy et 10% de parts complémentaires. La même année, pour préserver ses intérêts, Henri Théodore Pigozzi créa Simca Industries avec SOMECA, UNIC, la filiale française du constructeur de camions suisse SAURER implantée à Suresnes et acquise par UNIC en 1956, la division poids lourds SIMCA (ex-camions FORD France). En 1958, l’exportation des Simca Aronde en Amérique du Nord devint beaucoup plus importante grâce à Chrysler.
La première citadine Simca 1000 fut assemblée le 27 juillet 1961. Chrysler s’intéressa de plus à plus à Simca et ainsi, en décembre 1962, acheta 63% de parts sociales. Henri Théodore Pigozzi fut limogé le 31 mai 1963 lorsque Chrysler s’aperçut que Simca Industries ne faisait pas partie intégrante de la transaction. Il décéda d’une crise cardiaque le 18 novembre 1964. En 1966, Simca Industries fut vendue à FFSA (Fiat France SA), filiale de Fiat Veicoli Industriali. Le successeur à la tête de Simca fut Georges Héreil (1909-1980) qui respecta une note de son prédécesseur, mettre tout en œuvre pour lancer une traction. Ce sera la future Simca 1100. Le 1er juillet 1970, Simca devint Chrysler France.

Les Simca Aronde fabriquées par Facel-Métallon

La Simca Huit Sport devint la Simca 9 Sport au printemps 1952. Sa carrosserie demeura en aluminium et son adaptation sur le châssis autoporteur de la Simca Aronde fut problématique. De ce fait, par manque de rigidité, la variante cabriolet fut momentanément retirée. Son empattement passa de 2,42m à 2,44m, sa longueur de 4,1m à 4,15m.
A l’automne 1952, une nouvelle Simca 9 Sport, réalisée par Facel-Métallon, fut lancée. Sa carrosserie était en acier et équipée de vitres de custode. Sa longueur fut portée à 4,26m. En octobre 1954, les clignotants avant migrèrent depuis la calandre jusque sous les phares. Elle se dénomma alors Simca Aronde Coupé de Ville. Au printemps 1955, apparut le spider Simca Aronde Week-end. En septembre 1955, ils adoptèrent le 4 cylindres Flash Spécial de 1290cm³ développant 57ch à 5200tr/mn.


En septembre 1956, Facel-Métallon modernisa les lignes de son coupé et de son spider et les équipa d’un magnifique pare-brise panoramique. A cette occasion, le coupé et le spider prirent comme dénominations respectives Simca Aronde Plein Ciel et Simca Aronde Océane. En 1958, la puissance grimpa de 57ch à 60ch, puis à 62ch avec l’adoption du moteur Rush Super 5 paliers en 1960. Leurs longueurs passèrent à 4,28m. De 1961 à 1962, ils furent équipés du moteur Rush Super M de 70ch.






La descendance de la Simca Aronde

La Simca Aronde fut remplacée par le duo Simca 1300 / 1500 présenté lors du Salon de Genève en mars 1963. Ces voitures étaient d’une rare beauté. La presse et le public s’enthousiasmèrent devant ces nouveautés : empattement généreux de 2,52m très appréciable pour l’espace et le confort, surface vitrée importante et montants de pavillon fins, ouverture du capot vers l’avant, boîte à vitesses 4 rapports totalement synchronisée selon le brevet Porsche, nouveau 4 cylindres OHV de 1475cm³ muni d’un carburateur double-corps et freins à disques à l’avant pour la Simca 1500. En 1964, le break Simca 1500 fut introduit sur le marché. En 1965, le break Simca 1300 fut lancé et la boîte à vitesses automatique 3 rapports devint disponible en option sur la berline 1,5 litre. Ces élégants berlines et breaks présentaient, cependant, une esthétique trop lisse et trop fade et la nouvelle direction de Simca procéda rapidement à un restyling en septembre-octobre 1966. La Simca 1300 devint la Simca 1301 en adoptant les freins à disques à l’avant et un coffre allongé. La Simca 1500 devint la Simca 1501 en adoptant un coffre allongé. Le succès fut toujours au rendez-vous : 1 372 989 exemplaires pour les deux séries en 12 ans, plus de 100 000 exemplaires par an en moyenne. La plate-forme autoporteuse de la Simca Aronde fut exploitée pendant 24 ans. Le 27 septembre 1975, fut présentée leurs remplaçantes : le duo Simca-Chrylser 1307/1308 qui était équipé de 4 roues indépendantes, d’un 4 cylindres OHV transversal, de la traction. Une nouvelle aventure débutait…





Article co-écrit par : ABSOLUTELY CARS & CARDO
Crédit Photos : ABSOLUTELY CARS & Photos d’archives
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